Un projet de loi dite “pack de sécurité intérieure” est sur le point d’être voté en Turquie. Il sera discuté à partir de la semaine prochaine, en Commission à l’Assemblée Nationale.
Jeudi dernier, les avocats se sont rassemblés devant le Palais de Justice de Çağlayan à İstanbul pour demander le retrait de ce projet très contesté. Ils ont exprimé leur inquiétude en précisant que cette loi mettra le pays dans des conditions de couvre feu définitif, classera toute personne utilisant son droit de manifestation et protestation dans une catégorie “d’ennemi intérieur” et par conséquent donnera des pouvoir d’exception au gouvernement et à sa police.
La mobilisation a été suivie également à Ankara et à Izmir.
- Le projet de loi prévoit un renforcement des pouvoirs de la police. Les policiers pourront utiliser des armes de guerre, être placés directement sous les ordres d’un procureur, perquisitionner sans l’ordre d’un juge, faire des interventions sans recours possible, effectuer des écoutes téléphoniques pendant 48 heures sans aucun contrôle juridique, utiliser de “l’eau colorée” sur les les manifestants.
- Le Préfet pourra ordonner directement des gardes à vue, réquisitionner les véhicules et bien des mairies, donner des ordres directs au personnel municipal par l’intermédiaire de la police, assigner les policiers.
- Les informations d’enregistrement des véhicules de location pourront être intégrées en temps réel au système de sécurité. Les citoyens seront surveillés grâce aux pièces d’identité à puce.
- La gendarmerie et la police dépendront directement du ministère des affaires intérieures qui aura le pouvoir total sur celles-ci.
- Les manifestants portant des masques seront dans l’illégalité. Les cocktails molotov seront considérés comme armes. Concernant les manifestants, les peines de délit de port d’armes seront portés à 4 ans d’emprisonnement. Les dégâts causés lors d’une manifestation seront payés par les manifestants.
Par conséquent les droits de manifestation, de protestation, et la liberté d’expression sont bafoués. Tout manifestant sera considéré comme terroriste potentiel. l’interprétation de ses revendications et expressions sera au bon vouloir des forces d’ordres et leur commanditaires. L’incitation à la haine et terrorisme notamment en environnement virtuel deviendra un délit.
Cette loi n’a rien à voir avec la sécurité intérieure, mais c’est plutôt le dernier pas pour anéantir l’Etat de droit et ouvrir la porte à un Etat policier. Ce que le pouvoir AKP appelle “ordre social” ne sont que des efforts pour contenir la colère populaire qui s’exprime face aux assassinats des travailleurs que le gouvernement considère comme des accidents de travail, museler l’opposition populaire qui descend dans la rue et nier les droits légitimes des peuples. Le Premier Ministre Ahmet Davutoğlu a bien retenu la leçon lors de son voyage du 11 janvier à Paris. Il est devenu Charlie ou Cazeneuve au choix…
Une petition est en ligne pour la demande de retrait immédiat de ce projet : “Notre Liberté est en danger ! Stop à l’Etat de Police !”
Naz Oke pour Kedistan