Le 11 mai 2013, une explosion de deux véhicules chargés de bombes avait fait 52 morts à Reyhanlı, ville à la frontière de Syrie, en inscrivant cet attentat comme le plus sanglant de l’histoire de la République turque.
A partir de cette date, plusieurs alertes et avertissements ont été lancés.
Le 1er mai 2014, sur une alerte, les équipes de police ont arrêté un camion semi-remorque à Kırıkhan, commune de Hatay dans le Sud Est de la Turquie. La fouille du véhicule a été empêchée sur ordre de la Préfecture de Hatay. Les documents du camion stipulaient que le chargement concernait du « matériel d’aide humanitaire », mais il était soupçonné de transporter des armes vers la Syrie à destination de certains groupes rebelles, notamment djihadistes, pro Daech.
Le Ministre des Douanes, Hayati Yazıcı avait déclaré que tout ce qui était expédié vers la Syrie était vérifié aux rayons X et précisé que le ministère n’avait rien à voir avec cette affaire. Le Ministre des Affaires Intérieures Efkan Ala, avait annoncé à son tour, qu’il s’agissait des aides envoyés aux Turkmènes.
18 jours plus tard, 3 camions avaient été à nouveau arrêtés par les gendarmes à Adana. Un moment de grande tension avait été vécu entre les agents de MIT (RG turc) qui accompagnaient les camions et les gendarmes rejoints par l’équipe spéciale de la Police (équivalent CRS), allant jusqu’à réciproquement dégainer les armes.
Le procureur Aziz Takçı, avait déclaré qu’il avait vu personnellement que les camions étaient « chargés jusqu’à la gueule d’armes et munitions ». Les procédures légales n’avaient pourtant pas pu aboutir, sur l’intervention du Préfet d’Adana qui avait déclaré avoir reçu des ordres directs aussi bien du Ministre de l’Intérieur que de Tayyip Erdogan, alors Premier Ministre.
Le commandant de la gendarmerie qui avait dirigé l’opération et le procureur de la République Aziz Takçı ont été demis de leurs fonctions. Le procureur, accusé d’espionnage et de coup d’état, a été arrêté le 7 mai 2015.
Aujourd’hui le journal Cumhuriyet publie dans une vidéo, le contenu des camions. Ces images auraient été prises lors de la fouille des camions par les forces de l’ordre en janvier 2014 à Adana.
Can Dündar, Rédacteur en chef du journal quotidien Cumhuriyet explique pourquoi la rédaction a décidé de mettre à la lumière du jour les images qui prouvent la réalité catégoriquement reniée par le gouvernement AKP :
Si une quantité très importante d’armes et munitions suffisante pour anéantir toute une ville est débarquée dans un aéroport de ce pays,
Si cet arsenal est chargé dans les camions et a traversé des villes, des terres, les frontières de ce pays,.
Aujourd’hui le journal Cumhuriyet publie dans une vidéo, le contenu des camions. Si ces armes sont envoyées à l’insu du peuple, des autorités et des administrations de contrôle, pour soutenir un des adversaires d’une guerre qui se déroule dans un pays voisin, .
Si l’adversaire en question est une organisation terroriste qui a menacé régulièrement ce pays, et qui a même commis des attentats armés dans les frontières de ce pays,.
Si le gouvernement qui l’envoie renie avec insistance l’existence de cet arsenal, retire de ses fonctions, les autorités militaires qui ont arrêté le convoi et poursuit et arrête les procureurs qui ouvrent une enquête sur ces armes,.
Si le peuple de ce pays, ne connait pas les risques qu’il court à cause de cet arsenal, ne peut pas être informé des conséquences vitales, politiques, juridiques et diplomatiques de cette expédition,.
Si cette opération secrete est un délit à part entière, et qu’aucune loi ne suffit à légitimer ce délit,.
Le devoir d’un journal et d’un journaliste est d’informer son lecteur, renseigner le peuple sur ce danger, ces menaces, et d’avertir les autorités qui osent cette aventure..
Cumhuriyet publie ces images, avec la conscience de cette responsabilité.
Ajout du 19h :
Une censure étant mise sur cette information, le journal Cumhuriyet déclare être obligé de ne plus parler de ce sujet, et supprimer la vidéo à partir de 21h ! Elle sera toujours visible sur Kedistan.